20 décembre 1999 – La CRIIRAD décerne ses prix pour 1999 / Objectifs pour l’an 2000

Communiqué de presse – lundi 20 décembre 1999

Résumé

Le bilan 1999

Le prix CRII-RAD 1999 est décerné au secrétariat d’État à la Santé pour :

1. la mise en place d’une obligation de contrôle des niveaux de radon dans les établissements scolaires et les bâtiments publics.
Depuis que la CRII-RAD a rendu publics, en France, en 1987, les problèmes posés par ce gaz radioactif naturel, la circulaire 99/46 du 27 janvier 1999 des secrétariats d’État à la Santé et au Logement (janvier 1999) constitue la première décision d’importance des autorités françaises.

2. la décision de collecter, à compter du 1er décembre 1999, les objets au radium d’utilisation médicale.
L’organisation de cette campagne avait été demandée par la CRII-RAD, en mars 1998, suite à la découverte d’aiguilles de radium oubliées dans la salle d’attente d’un cabinet de radiologie (l’irradiation était mesurable depuis la rue !).

3. les efforts de transparence et de dialogue du Bureau de Radioprotection, une structure assez récente créée au sein de la Direction Générale de la Santé.

Le prix SUPERPHÉNIX 1999 est décerné ex-aequo à la COGÉMA et à la DSIN

– à la COGÉMA pour les méthodes utilisées dans sa campagne publicitaire et pour la diffusion sur internet d’informations tronquées et trompeuses ;

– à la DSIN pour sa mauvaise gestion des demandes d’autorisation de rejets radioactifs et chimiques des installations nucléaires.

Objectifs de la CRII-RAD pour l’année 2000

Trois dossiers ont été déclarés prioritaires pour 2000 :
1. La transposition de la directive européenne 96/29 qui doit intervenir avant le 13 mai 2000 et qui implique des choix décisifs en matière de radioprotection.

2. Le renouvellement des autorisations de rejets radioactifs et chimiques de l’usine de retraitement de la COGÉMA, à La Hague.

3. La publication d’un dossier de référence sur le véritable impact de l’accident de Tchernobyl sur la France, en réponse aux évaluations officielles de 1997-1999.

Version longue

BILAN 1999

À compter de 1999, la CRII-RAD a décidé d’évaluer les actions qui auront été conduites dans l’année écoulée en matière de protection contre les dangers des rayonnements ionisants et d’information sur toutes les questions liées à la radioactivité et au nucléaire.
L’examen portera sur les actions conduites par les autorités, les organismes de contrôle et les exploitants et qui sont en rapport avec les dossiers d’intérêt général défendus par l’association et les missions que définissent ses statuts : développement d’une information pluraliste sur le nucléaire ; protection des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants ; contrôle des niveaux de radioactivité dans l’environnement, les denrées alimentaires, les matériaux et les biens de consommation ; respect et amélioration des règlements de radioprotection.

Le Prix CRII-RAD récompensera les actions positives marquant une avancée en matière de radioprotection, de contrôle des pollutions radioactives ou de droit à l’information sur les dossiers du nucléaire ; le Prix SUPERPHÉNIX épinglera les actions qui auront au contraire favorisé la dissémination des produits radioactifs, porté atteinte à la protection des travailleurs ou des populations, entravé leur droit à l’information en faisant obstacle à la diffusion des informations ou en diffusant des informations erronées ou mensongères.

Le prix CRII-RAD 1999 est décerné au secrétariat d’État à la Santé pour :

1. la mise en place d’une obligation de contrôle des niveaux de radon dans les établissements scolaires et les bâtiments publics.
Le 27 janvier dernier, les secrétariats d’État au Logement et à la Santé ont publié une circulaire conjointe prévoyant des campagnes d’information, d’identification des zones à risques et de contrôles des niveaux de radon dans tous les bâtiments publics où le temps de présence est important. Les évaluations ont commencé, dès 1999, dans 27 départements considérés comme prioritaires.
Cette décision met en lumière le chemin parcouru en 12 ans :
· En 1987, la CRII-RAD découvrait les travaux effectués dans les pays anglo-saxons où les autorités considèrent que le radon, un gaz radioactif naturel, constitue un problème de santé publique (deuxième cause de décès par cancer du poumon après le tabac). Le laboratoire s’équipait alors pour effectuer des contrôles et lançait une première campagne d’information du public.
· En 1988, en réponse à cette action de sensibilisation qui sera relayée par le mensuel “QUE CHOISIR “, le Service Central de Protection contre les Rayonnements Ionisants, service spécialisé du ministère de la Santé, avait répondu en objectant que l’homme préhistorique vivait dans des cavernes où les niveaux de radon étaient plus importants qu’aujourd’hui – (sous-entendu, s’il avait survécu, c’est que nous ne risquions rien). Le communiqué se terminait sur le conseil d’aérer les habitations afin de traiter d’autres pollutions domestiques “bien réelles celles-là”.
· En 1999, on mesure le chemin parcouru. La publication de la circulaire fait espérer que d’ici quelques années, la totalité des établissements scolaires aura pu être contrôlée et les bâtiments à risque traités afin de réduire l’exposition des élèves et du personnel.

2. la décision de collecter, à compter du 1er décembre 1999, les objets au radium d’utilisation médicale.
Le 12 mars 1998, le laboratoire de la CRII-RAD effectuait des contrôles radiamétriques dans une rue du centre ville de Nice (rue du Maréchal Joffre). Des passants se faisaient irradier à leur insu par une source radioactive située dans un cabinet de radiologie. L’enquête a permis de démontrer que des aiguilles de radium 226, une substance radioactive très irradiante, très radiotoxique et génératrice de gaz radioactif, avaient été oubliées depuis des mois, et peut-être des années, dans un recoin de la salle d’attente. Des patients du cabinet, des femmes enceintes venant pour une échographie par exemple, avaient ainsi été exposés à une irradiation non négligeable et totalement injustifiée.
Consciente qu’il ne s’agissait pas d’un cas isolé, la CRII-RAD demandait au secrétaire d’État à la Santé, M. Kouchner, l’organisation d’une campagne de sensibilisation du milieu médical et la récupération de toutes les sources radioactives à usage médical utilisées dans le passé.
Contrairement à ce qui se passe souvent, la réponse allait au delà d’un simple accusé de réception, M. Kouchner nous écrivant ” j’ai donné instructions à mes services d’organiser la récupération des sources de curiethérapie qui pourraient être détenues par des médecins “. A l’issue de plusieurs mois de réflexion et de préparation, la campagne a effectivement commencé sous la responsabilité de l’OPRI et de l’ANDRA.

3. les efforts de transparence et de dialogue du bureau de radioprotection, structure créée assez récemment au sein de la Direction Générale de la Santé.
Des réunions de travail pluralistes ont été organisées sur deux dossiers importants suivis par la CRII-RAD
– l’incorporation de silicate de sodium anormalement radioactif dans certaines laines de verre ;
– l’utilisation d’uranium appauvri, une matière nucléaire radioactive, pour la fabrication d’émaux et la décoration d’objets vendus au public.

Par ailleurs, en mars 1999, la CRII-RAD avait posé la question du statut des atolls de Moruroa et Fangataufa où se sont accumulées d’importantes quantités de déchets radioactifs, ce dossier n’a pas été classé sans suite mais est en cours d’instruction.
Quelles que soient les divergences d’appréciation entre notre association et le secrétariat d’Etat sur le fond des dossiers (1), le souci de transparence et d’argumentation constitue une approche positive et novatrice au sein de la DGS.

Le prix SUPERPHÉNIX 1999 est décerné ex-aequo à la COGÉMA et à la DSIN

– à la COGÉMA pour les méthodes utilisées dans sa campagne publicitaire et pour la diffusion sur internet d’informations tronquées et trompeuses.
En particulier pour avoir récupéré une photographie prise par la CRII-RAD le 16 mars 1997, en témoignage d’une infraction de la COGÉMA aux règles de base de la radioprotection, et s’en servir comme illustration d’un texte affirmant que les rejets de l’usine d’extraction du plutonium de La Hague sont comparables à ceux de tout site industriel.
Ainsi, à la lecture de l’argumentaire COGÉMA, on se demande si la canalisation sert à autre chose qu’à rejeter au large l’eau de pluie collectée sur le site !

La lettre adressée par la CRII-RAD à Anne Lauvergeon, PDG de Cogéma, est disponible sur ce site.

– à la DSIN pour sa gestion des demandes d’autorisation de rejets radioactifs et chimiques des installations nucléaires.

– Pour avoir accordé à la centrale nucléaire de Saint-Laurent des-Eaux des autorisations de rejets disproportionnées par rapport à ses besoins réels et qui plus est sans limitation de durée, en violation des accords internationaux signés par la France en juillet 1998 dans le cadre de la convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique Nord-Est. Ces accords imposent, à échéance de 2020, de parvenir à un impact zéro, tant pour les rejets de polluants radioactifs que chimiques ;

– Pour avoir transmis à l’enquête publique sur les autorisations de rejets radioactifs et chimiques de la centrale nucléaire de Saint-Alban, des dossiers incomplets et erronés, contrairement aux obligations réglementaires et pour avoir confié à l’IPSN l’expertise des études radioécologiques que cet organisme avait lui-même réalisé avec le financement d’EDF.

La lettre ouverte aux ministères de la Santé, de l’Environnement et de l’Industrie demandant l’annulation de l’enquête publique sur les rejets de la centrale nucléaire de Saint-Alban est disponible en cliquant sur ce lien.

LES OBJECTIFS DE LA CRII-RAD POUR L’ANNÉE 2000

Trois dossiers ont été déclarés prioritaires pour 2000 et ce choix a été validé à l’unanimité par l’assemblée générale des adhérents qui s’est réunie le 28 novembre dernier :

1. La transposition de la directive européenne 96/29 qui doit intervenir avant le 13 mai 2000 et qui implique des choix décisifs en matière de radioprotection.

La transposition de la directive impose la révision des textes de radioprotection français.
Certains aspects sont très positifs, ainsi la révision à la baisse des limites fondamentales de dose et, plus encore, l’importance accordée à la justification des pratiques ou encore la prise en considération des expositions anormales à la radioactivité naturelle.
Mais la directive laisse aussi aux États la possibilité de fixer des seuils de libération pour les matériaux et déchets radioactifs issus des installations nucléaires, instaure des seuils d’exemption de tout contrôle très élevés pour certains radionucléides, prévoit de substituer au régime général d’interdiction d’ajout de substances radioactives aux biens de consommation un simple régime d’autorisation préalable, fixe un niveau de protection du ftus insuffisant, etc.

2. Le renouvellement des autorisations de rejet radioactifs et chimiques de l’usine de retraitement de la COGÉMA, à La Hague.

L’enquête publique devrait débuter en janvier 1999. La CRII-RAD a demandé au ministère de l’Environnement et au Premier ministre d’intervenir afin que la durée de la consultation soit suffisante pour étudier les dossiers présentés par COGÉMA.

3. La publication d’un dossier de référence sur le véritable impact de l’accident de Tchernobyl sur la France.

Ce document devra répondre :
· aux évaluations officielles de 1997-1999 (CSSIN, DSIN, IPSN) qui ont conclu qu’en mai 1986 les autorités avaient eu raison de ne pas intervenir pour protéger les populations françaises ;
· à la confusion entretenue depuis plusieurs années sur le “mensonge de Tchernobyl”, qui conduit peu à peu à réécrire l’histoire.

(1) La CRII-RAD demande ainsi le maintien de l’interdiction d’ajouter des substances radioactives aux biens de consommation et d’assortir les éventuelles dérogations d’une garantie d’information du public. Cette position n’est pas partagée par la DGS qui s’oriente vers un régime général d’autorisations préalables sans prendre position sur la question de l’étiquetage.