17 mai 2010 – Normes de radioactivité dans les eaux potables

Communiqué du 17 mai 2010 – Avec compléments du 20 mai 2010

Les normes relatives à la qualité radiologique des eaux potables sont mal conçues. Les habitants sont exposés à des niveaux de risques très supérieurs à ce que la réglementation est censée leur garantir. Ce défaut de protection concerne tout particulièrement les enfants en bas-âge et les adolescents.

Se basant sur les analyses de son laboratoire et sur une étude approfondie des normes, la CRIIRAD demande un remaniement complet du dispositif de contrôle de la qualité radiologique des eaux destinées à la consommation humaine.

La CRIIRAD demande également le traitement en urgence des situations à risque déjà identifiées ainsi que des garanties d’information pour les consommateurs, les municipalités et les gestionnaires des réseaux de distribution.

 


1. POUR RAPPEL
  • La CRIIRADLa Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité – est une association à but non lucratif qui a pour objet statutaire la défense du droit à l’information et la protection des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants (Cf. article 1 des statuts). Pour conduire ses investigations, elle dispose de son propre laboratoire, spécialisé dans les analyses de radioactivité et agréé par l’Autorité de Sûreté Nucléaire pour les mesures de radioactivité dans l’environnement. 
  • Les dispositions réglementaires
  • En France, la réglementation [2] , est censée garantir à chaque citoyen – quel que soit son âge ou son lieu de résidence – que l’eau qui alimente son habitation [3], l’eau qu’il utilise comme eau de boisson ou pour ses préparations culinaires, ne lui délivrera pas une dose de rayonnements supérieure à 100 microSieverts par an (100 µSv/an ou 0,1 mSv/an).
    Ce niveau d’exposition correspond à un niveau de risque jugé acceptable par les autorités sanitaires
    . Il correspond, selon les coefficients de risque actuellement en vigueur au niveau international et européen, à un risque de décès par cancer de 5.10-5 . mSv-1, soit 5 décès par cancer pour 1 million de personnes exposées à une dose annuelle de rayonnements ionisants de 100 µSv (ou encore 325 décès par cancer radio-induit pour 65 millions de consommateurs).
    Que l’on juge ce niveau de protection satisfaisant ou insuffisant, c’est celui que chaque citoyen est en droit de réclamer. Or, une analyse approfondie du dispositif de contrôle radiologique de l’eau potable montre qu’il n’en est rien. Une part importante de la population est soumise à des niveaux de dose très supérieurs. Pour les enfants en bas-âge et les adolescents, les doses, et donc, le risque peut être 10 fois, voire 100 fois, supérieur à ce que la réglementation est censée leur garantir.

    Voici en résumé, les principaux constats et les demandes de la CRIIRAD (chaque paragraphe est détaillé dans la présentation des dysfonctionnements du dispositif réglementaire et les demandes de la CRIIRAD) .


2. Les dysfonctionnements du dispositif réglementaire et les demandes de la CRIIRAD


1/ L’absence de limites contraignantes :
la référence de dose de 100 µSv/an n’est qu’un paramètre indicatif, qui peut facilement être dépassé. La CRIIRAD demande l’instauration de véritables limites et la transparence sur la délivrance des dérogations.

2/ Des mesures de dépistage mal conçues qui génèrent un taux élevé de faux négatifs. La CRIIRAD demande que les analyses radiologiques de référence garantissent une caractérisation fiable des radionucléides présents dans l’eau.

3/ Les enfants sont exposés à des niveaux de dose, et par conséquent de risque, très supérieurs (jusqu’à 5 ou 6 fois !) à ce que prévoit la réglementation. La CRIIRAD demande que les limites de dose et les indicateurs de radioactivité soient dimensionnés en fonction des groupes de population les plus sensibles (enfants en bas âge et adolescents) de façon à ce que l’ensemble des consommateurs soient protégés.

4/ La réglementation oublie certains produits radioactifs, et notamment le radon 222, ce qui conduit souvent à une sous-évaluation considérable des doses réellement subies par les consommateurs. La CRIIRAD demande en conséquence que le dosage du radon soit ajouté à la liste des contrôles obligatoires et qu’en application de la recommandation européenne du 20 décembre 2001, une limite de référence de 100 Bq/l soit instaurée, l’adoption d’une valeur supérieure devant être dûment justifiée par les autorités sanitaires. Compte tenu des niveaux de risque associé, le dispositif devrait être complété par un seuil d’investigation défini à une valeur inférieure.

5/ La toxicité chimique de l’uranium n’est pas prise en compte par la réglementation française. La CRIIRAD demande que ce métal lourd particulièrement toxique, soit ajouté dans la liste des produits chimiques qui doivent être contrôlés et que lui soit appliquée une limite contraignante (une limite que la CRIIRAD souhaiterait inférieure à la valeur de 15 µg/l recommandée par l’OMS).

6/ Les autorités sanitaires sont informées, parfois depuis des années, de situations préoccupantes sans que les habitants en soient informés et sans qu’aucune mesure correctrice n’ait été prise. La CRIIRAD sollicite l’intervention du ministère de la santé et de l’Autorité de Sûreté Nucléaire pour que les cas les plus préoccupants soient traités dans les meilleurs délais.

7/ L’information relative aux contrôles de radioactivité dans l’eau destinée à l’alimentation humaine n’est pas accessible aux consommateurs et contribuables qui financent pourtant son élaboration. La CRIIRAD demande que tous les résultats d’analyse disponibles (alpha et bêta total, DTI, radon, etc) soient accessibles via le site Internet du ministère de la Santé et que toutes les parties concernées (habitants, municipalités, gestionnaires des unités de distributions) soient dûment informées dès lors que des résultats préoccupants sont enregistrés.

 

[1] La CRIIRAD avait saisi le préfet de la Haute-Vienne dès le 23 décembre 2009, en lui communiquant les résultats de l’analyse effectuée par son laboratoire sur l’eau d’un des captages de la commune de Saint-Sylvestre, une analyse montrant une teneur très élevée en radon 222 (1 230 Bq/l) nécessitant un traitement urgent du dossier.


[2] Cf. notamment : Code de la santé publique ; Décret 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine, à l’exclusion des eaux minérales naturelles ; Arrêté du 12 mai 2004 fixant les modalités de contrôle de la qualité radiologique des eaux destinées à la consommation humaine, publié au JORF du 18 juin 2004.

[3] La réglementation s’applique également aux eaux de source achetées en bouteille. Les eaux minérales naturelles font l’objet d’une réglementation spécifique.

 


Radon 222 dans l’eau potable
en Haute-Vienne
Voir les résultats

En savoir plus

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Travail en cours

Constitution d’un dossier de référence sur les normes relatives à la qualité radiologique des eaux destinées à l’alimentation humaine. Travail de recherche cofinancé par la CRIIRAD et la région Rhône-Alpes dans le cadre de la convention pluriannuelle d’objectifs 2007-2009, au titre des projets 2009

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