[Décryptage] En réponse à l’émission “Le Téléphone Sonne” (France Inter) du lundi 16 janvier 2023

Lors de cette émission, intitulée « Crise énergétique : le retour en grâce du nucléaire ? », les deux invités de France Inter, Valérie Faudon (déléguée générale de la Société Française d’Énergie Nucléaire) et Nicolas Goldberg (consultant spécialiste de l’énergie à Columbus Consulting) ont énoncé plusieurs contre-vérités et imprécisions.

Premier décryptage en vidéo

Julien Syren, ingénieur géologue au laboratoire de la CRIIRAD, apporte réponses et éclairages suite à la diffusion de l’émission “Le Téléphone Sonne” sur France Inter du lundi 16 janvier 2023 ayant pour thème “Crise énergétique : le retour en grâce du nucléaire ?” dans la vidéo ci-dessous :

Script : Julien Syren | Montage : Elodie Weber | Images : Martin Boudot, Fēng Zhī Qīng Yáng, André Paris, CRIIRAD | Musique : Benjamin Tissot – www.bensound.com ©CRIIRAD 2023

Analyse du passage consacré au minerai d’uranium

Selon un auditeur, « l’uranium vient d’Afrique ou du Kazakhstan, ne l’oublions jamais, ils viennent de dictatures qui exploitent les travailleurs ». Mme Faudon répond : « la première réserve dans le monde d’uranium c’est l’Australie, je ne pense pas qu’ils soient vraiment infréquentables […] 40% des réserves d’uranium dans le Monde sont dans des pays de l’OCDE, donc des grandes démocraties ». L’auditeur parle de production d’uranium, Mme Faudon évoque les réserves d’uranium. Ces deux notions sont différentes, comme le montre l’édition 2020 du rapport « Uranium : Resources, Production and Demand » co-publié par l’AIEA et l’AEN (organisme dépendant de l’OCDE).

Les principaux producteurs d’uranium sont, en 2018, le Kazakhstan (41%), le Canada (13%), l’Australie (12%) et la Namibie (10%). Seulement 26% de l’uranium produit dans le monde viennent de l’OCDE, et 57% du Kazakhstan et d’Afrique (en incluant le Niger, 5%, et l’Afrique du Sud, 1%). D’après Le Monde, les principaux fournisseurs de la France entre 2005 et 2020 sont le Kazakhstan (20%), l’Australie (19%) et le Niger (18%).
Concernant les réserves, le rapport AIEA/AEN distingue 4 catégories, selon le coût de production : moins de 40 $/kg, 40 à 80 $/kg, 80 à 130 $/kg et 130 à 260 $/kg. 

Si 42% des réserves globales (25% en Australie) se trouvent bien dans des pays de l’OCDE, la proportion tombe à 17% pour les réserves les plus accessibles (moins de 80 $/kg). Largement dominée par le Kazakhstan (36% du total mondial), cette catégorie n’inclut pas l’Australie, dont les coûts de production estimés dépassent 80 $/kg pour l’ensemble des réserves.

Si l’auditeur pointe à raison le problème des pays producteurs d’uranium, la réponse rassurante de Mme Faudon ne tient pas compte de l’état réel de la filière de production d’uranium.

NB : au-delà de ce débat de chiffres, la CRIIRAD dénonce depuis plusieurs décennies les pollutions liées à l’extraction d’uranium, en particulier au Niger.

Sources citées dans la vidéo
EDF, « Synthèse de l’étude thermique du Rhône », mai 2016 : https://www.rhone-mediterranee.eaufrance.fr/sites/sierm/files/content/migrate_documents/EtudeThermiqueRhone-Plaquette-Mai2016.pdf
Lin J. & al., « Quantitative estimation of sea surface temperature increases resulting from the thermal discharge of coastal power plants in China », Marine Pollution Bulletin 164 (2010) 112020