06/09/2001 – Impact de Tchernobyl en Corse Rectificatif et droit de réponse de la CRIIRAD

Communiqué de presse – Jeudi 6 septembre 2001
Impact de Tchernobyl en Corse
Rectificatif et droit de réponse de la CRIIRAD

Dans une dépêche AFP datée du 3 septembre et largement reprise par les media, M. Philippe RENAUD (1) indique que l’IPSN parvient à deschiffres très supérieurs à ce qu’avait annoncé la CRIIRAD après des mesures en 1999 et 2000“, précisant que ” sur les sites les plus arrosés, des dépôts allant de 20 000 Becquerels/m2 à plus de 35 000 Bq/m2 ont été calculés par l’IPSN “.

Cette affirmation est doublement erronée : erreur sur les chiffres et erreur sur les dates.


Le laboratoire de la CRIIRAD a, en effet, évalué les dépôts de césium 137 de Tchernobyl sur la zone concernée (Aléria/Solenzara) à plus de 30 000 Bq/m2
(chiffre que l’on ne peut qualifier de très inférieur à 20 000 Bq/m2) et cette évaluation date de 1988 (et non de 1999/2000).

Le carottage de sol effectué à Ghisonaccia en juillet 1988 avait permis d’évaluer à 32 000 Bq/m2 les dépôts de césium 137 imputables à Tchernobyl (soit un dépôt d’iode 131 compris entre 160 000 et 300 000 Bq/m2) ce qui imposait de prendre des mesures d’interdiction des aliments sensibles. Ces mesures n’ont pas été prises ce qui motive la plainte déposée en mars 2001 en association avec des malades de la thyroïde. Une action en justice avait d’ailleurs été engagée par la CRIIRAD dès 1989 contre le préfet de Haute-Corse pour défaut d’information et de protection des habitants de l’Ile.

La CRIIRAD a régulièrement souligné que les niveaux de contamination du sol qu’elle publiait étaient des estimations a minima : les prélèvements de sol ayant été effectués plusieurs années après les dépôts (2 ans pour la Corse), une partie du césium avait en effet pu être lessivée (en proportion variable selon les caractéristiques du sol (2) ce qui fait que l’on ne peut donner qu’un minima et non une fourchette.

Des années durant, les services officiels français ont au contraire soutenu que les retombées de Tchernobyl était très inférieures aux évaluations de notre laboratoire.


Quinze ans après
la catastrophe de Tchernobyl, les chiffres officiels s’approchent des minima de la CRIIRAD et la Corse est officiellement classée parmi les régions les plus contaminées de France. Mieux vaut tard que jamais.

Si, à l’avenir, les services officiels démontraient que les chiffres de la CRIIRAD ont considérablement sous-évalué l’ampleur de la contamination, il va de soi que ces éléments seraient immédiatement pris en compte et versés au dossier de la plainte déposée pour non protection des populations françaises.

 

(1) Directeur du laboratoire d’études radioécologiques continentales et de la Méditerranée, laboratoire de l’IPSN (Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire) basé à Cadarache.
(2) Des suivis effectués sur plusieurs commune d’Alsace suggèrent des pertes de l’ordre de 30%.

 

Publier l’étude de 1986 plutôt que les modélisations de 2001.
Les calculs de l’IPSN reposent sur des modélisations basées sur les données de pluviosité (la pluie a aggravé les dépôts radioactifs en lessivant les masses d’air contaminées).

La CRIIRAD avait utilisé cette méthode dès 1986 pour établir une carte théorique de la contamination à partir des trajectoires des panaches radioactifs et des données de pluviosité achetées à la météorologie nationale. Sur la base de ce travail, elle avait interpellé les autorités afin qu’elles ciblent les contrôles sur les zones à risque (tiers Est de la France) au lieu de moyenner les valeurs avec les résultats provenant de l’Ouest.

Cette approche comporte cependant des limites.

Concernant la Corse, la prise en compte exclusive de la pluviosité va méconnaître des phénomènes spécifiques de contamination, liés par exemple aux brouillards intenses du début mai 86. Ces conditions météorologiques particulières ont conduit à une contamination élevée de la chaîne alimentaire dans des secteurs où la pluviosité a été très faible.

Il est regrettable que l’étude réalisée, en 1986, par l’IPSN, sur la vallée du Tavignano, ne soit toujours pas publiée, en dépit des demandes répétées de la CRIIRAD et du GSIEN. Les mesures de 1986 devraient être plus fiables que des modélisations de 2001.